Comment je mène Out of the Abyss : session 1


La campagne Out of the Abyss (OotA) pour D&D5 m'a toujours fait de l’œil, depuis sa sortie en 2015 jusqu'au moment où, n'en tenant plus de ne pas voir arriver une traduction francophone, j'ai fini par décider de maîtriser la campagne à partir du bouquin en anglais. Pour l'occasion j'ai réuni mon groupe "historique" de D&D5, et nous avons mené la première partie fin Septembre 2020.

Dans cette série d'articles, je m’attellerais moins à raconter ce qui se passe dans la fiction (il y a sur le net pléthore de comptes-rendus de partie) qu'à développer mes bidouillages de MJ et comment j'applique les différentes idées que je pioche ici ou là. Je m'étendrais assez peu sur l'intrigue de la campagne : des résumés existent, et surtout mes joueuses risquent de passer par ici et je ne veux rien leur divulgâcher. Il y aura du spoil toutefois pour ceux qui ignorent tout de la campagne.

Néanmoins, histoire de situer un petit peu, voici un très bref résumé de la situation de départ : 

Capturés par des drows, les personnages se retrouvent enfermés dans la cellule d'un avant-poste, à des kilomètres sous la surface, dépouillés de leur équipement et possessions, à attendre qu'une patrouille les emmène à Menzoberranzan, la capitale drow, où leur sort en tant qu'esclave sera décidé. Leur objectif : s'échapper avant l'arrivée de ladite patrouille.

Pour ma préparation, je suis allé piocher pas mal d'idées sur les groupes (anglophones) Facebook et Discord des MJ d'OotA, ainsi que quelques idées provenant des ouvrages Sortir de l'Auberge chez les Lapins Marteaux.

Les geôliers drows menés par leur prêtresse de Lolth.

Avant la partie

La création du groupe

Contrairement à mon habitude, j'ai demandé à mes joueuses de créer leur personnage en ignorant ce que les autres allaient jouer, et sans livrer aucune information sur la campagne (à part une note d'intention assez courte). Je me gardais un simple droit de regard pour éviter d'avoir 6 guerriers, évidemment, mais sinon tout était permis. En effet, pas besoin pour leurs personnages de se connaître, la création du groupe passant par le fait qu'ils soient tous captifs des drows (mais cela, ils l'ignoraient), peu importe d'où viennent les personnages. 

Mes joueuses ont accueilli ce fonctionnement inhabituel avec pas mal d'humour, jouant entre elles à deviner ce que les autres avaient choisi - sur la base des personnages qu'elles ont l'habitude de jouer. Autour de la table, le mystère a été maintenu, de telle sorte que chaque nouveau sortilège lancé par l'un ou l'autre des personnage crée de la spéculation sur la classe dudit personnage. Ce petit métajeu est assez bienvenu puisque l'ambiance de la campagne étant assez lourde et angoissante, il offre un peu de relâchement de la tension.

Après coup je ne suis pas certain que ça ait été une si bonne idée que cela; en effet, mes joueuses ont fait un bel effort pour créer des backgrounds intéressants, avec des PNJ hauts en couleur, évitant l'écueil du "barbare orphelin et vagabond". Les plonger dans l'Outreterre, si loin de leurs proches, offre assez peu d'opportunités pour interagir avec ce contenu. Je mise sur la mise en scène de souvenirs avec ces mêmes PNJ pour rappeler constamment aux personnages qu'ils sont loins de chez eux. C'est une exploitation un peu faible, mais parmi les seules à ma portée. Peut-être qu'en divulguant qu'ils allaient être capturés par les drows, et en sacrifiant l'effet de surprise, je leur aurais évité de mettre autant d'effort dans un background qui sera finalement peu exploité avant un moment (sous réserve qu'ils sortent de l'Outrerre).

Règles spéciales

OotA regorge de PNJ en tout genres, qui peuvent (ou non) accompagner le groupe. Ainsi, ce ne sont pas moins de 10 PNJ qui sont présentés dans la première scène, les camarades de cellule des personnages. Les combats à D&D étant souvent assez pénibles à mener, de nombreux MJ préfèrent éliminer tout ou partie des PNJ du livre pour éviter de devoir gérer des combats impliquant une vingtaine de combattants. Néanmoins, je ne voulais pas tuer arbitrairement ces PNJ lors de l'évasion de l'avant-poste, car ils ont tous des backstories intéressantes à mettre en scène.

A la place, j'ai opté pour les règles de compagnons non-officielles de la DMs Guild, qui ont été conçues par son auteur expressément pour OotA. Pour quelques dollars, vous pouvez acquérir ce petit compendium de règles que je trouve plutôt bien foutues. Chaque PNJ est représenté par une petite carte, qui sera associée à un PJ. Dès lors, le PNJ se bat avec le personnage, lui apportant une capacité spéciale (prendre un coup à sa place, lui permettre d'utiliser une attaque sournoise, etc). Si les personnages jouent une scène de roleplay avec le PNJ, il gagne l'Inspiration, qu'il peut dépenser pour utiliser une autre capacité spéciale. C'est assez malin car cela "force" les joueuses à s'impliquer dans le roleplay avec les PNJ, qui sinon pourraient facilement rester en arrière-plan. Il y a d'autres subtilités, évidemment, mais le cœur de la mécanique est ici.

Par ailleurs - même si on ne les as pas encore testées, je joue avec l'option de Guérison Naturelle présente dans le Guide du Maître; les repos longs n'apportent pas une récupération complète des PV, il faut dépenser des dés de vie (comme pour un repos court). En effet, puisque les voyages dans l'Outreterre sont assez longs, il y aura assez peu d'affrontements. Guérir plus lentement permettra de redynamiser (je l'espère) ces combats qui sinon seraient trop simples (les personnages étant toujours au meilleur de leur forme). 

Pendant la partie

L'introduction

La campagne démarre in media res, les personnages au fond de leur cellule. La campagne préconise de se soucier assez peu du comment les personnages ont été capturés. J'ai décidé de faire le contraire; j'ai préparé pour chaque personnage une lettre d'amour, indiquant les circonstances de sa capture, ainsi que les trouvailles qu'il a réussi à subtiliser au nez et à la barbe de ses geôliers (allant de l'araignée à un ruban de corde en soie).

J'ai préparé l'introduction de la campagne en fermant tous les volets, ne laissant qu'une petite lampe torche pour moi-même. Tant que les personnages seront en Outreterre, je compte jouer sans lumière naturelle ni vraie lampe (pour information nous avons joué l'après-midi, évitant tout problème d'assoupissement). J'ai acheté au Maxi Bazar 6 lampes LED en forme de bougie, dont je peux changer la couleur à l'aide d'une télécommande.

Après avoir passé un extrait du thème d'Alice au Pays des Merveilles, qui me servira de générique pour la campagne, j'ai lu à voix haute le paragraphe d'introduction de la campagne, qui présente la situation initiale. Ensuite, toujours avec mon unique lampe torche pour éclairer la table, j'ai lancé Fear of the Dark.

Durant les 7 minutes et quelques que durent le morceau, j'ai tendu à chaque joueuse (avec une minute d'intervalle entre chaque, environ) sa lettre d'amour, avec une des bougies LED pour qu'elle puisse lire. Cela a fait son petit effet et j'ai pris beaucoup de plaisir à voir leurs têtes déconfites au fur et à mesure qu'elles lisaient. 

Une fois le morceau achevé, chacun disposant maintenant d'un modeste éclairage, nous avons vraiment démarré la partie.

Gérer l'évasion

Les personnages souhaitent s'évader. Pour autant, ils ne possèdent rien, ne connaissent pas leur environnement, et ils sont entourés d'ennemis terrifiants (drow, araignées géantes, et quaggoths). Cette situation de jeu est plutôt ardue à gérer compte tenu qu'il s'agit de la première séance de la campagne, les personnages sont niveau 1 et relativement démunis face à leur sort. 

Pour ne pas paralyser mes joueuses devant une telle situation, j'ai pris le parti de leur prémâcher le travail, au sens où je les ai laissé roleplayer autant qu'elles le souhaitaient entre elles et avec les PNJ, mais en introduisant les amorces permettant l'évasion sans leur laisser le temps de concevoir un véritable plan. Après environ 1h30-2h de jeu et de roleplay, j'ai donc amorcé l'évasion et cela c'est passé relativement en douceur, avec peu d'effusion de sang. Les personnages ont pu récupérer une partie de leur équipement pendant que les drows étaient occupés à se battre avec des démons.

Nous avons conclu la séance en discutant des différentes options de fuite dans l'Outreterre (aller vers tel ou tel lieu). Mes joueuses ont eu l'air satisfaites, ne m'ont pas reproché le dirigisme de la séance et très enthousiastes à l'idée de continuer l'aventure : j'estime que cette première session a porté ses fruits !

Après la partie

Je mentionne ici rapidement que j'ai proposé à mes joueuses de gérer un genre de "wiki" de la campagne pour tenir compte des événements, personnages et lieux rencontrés. 

Nous utilisons pour cela l'outil Kanka, qui répond parfaitement à nos attentes.


Je vous remercie d'avoir pris le temps de lire jusqu'ici et vous donne rendez-vous pour un prochain rapport de partie, une fois que nous aurons joué la seconde session, fin octobre.


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